J'ai fait du théatre dans ma prime jeunesse, c'était entre 8 et 10 ans (on passera sur mes remarquables prestations d'un Hibou et d'un Eléphant, hum... et d'un chat dans la mise en scène de "dialogues de betes" de Colette en 5ème) et bien que toujours timide en société, m'afficher dans la peau d'un personnage qui n'était pas moi mais vivait grace à moi ne m'a jamais effrayée. C'est ça qui est bien au théatre, on ne vous regarde pas vous, on regarde votre personnage.
Par la suite (comprendre: bien plus tard dans la vie), mon chemin (jusqu'alors demeuré loin des feux de la rampe :P) a croisé le club tout nouvellement créé de l'ISITHEATRE (instant séquence émotion: je peux dire que je suis vétéran d'une association de l'ISITV,une pionnière^^). Et là, que dire de ces trois années, de ces trois projets menés à bien pour le plus grand plaisir d'un public fidèle et enthousiaste? Allez retour en arrière ;)
1ère année, ou comment se faire la main sur l'art de monter une pièce:
L'ISITHEATRE voit le jour en début d'année scolaire 2004 avec Mme Dissard (directrice des langues à l'ISITV) qui veut monter une troupe de théatre. De la petite foule enthousiaste dans l'amphithéatre de l'école, il n'en restera que dix (dont deux à l'admin) autour d'Anne-Marie (Non c'est pas Highlander, on leur a pas coupé la tete, meme si Lao-Tseu l'a dit...).
Au menu (début des répétitions en Mars 2005, présentation en Décembre 0_o, oui ce fut long, mais rappelons qu'il y a des stages de 1A et 2A au milieu): Du Vent dans les Branches de Sassafras, de René de Obaldia, membre de l'Académie Française, attention ça ne rigole.
Eh bien si! Ca rigole et meme beaucoup. Entre la prestation magistrale de Maxime dans le role du père de famille gouailleur, patriote et un tantinet bouché à l'émeri (bon j'arrete les jeux de mots stupides, ceux qui se souviennent du prénom de Rockfeller père comprendront...), les délires éthyliques de Youssef en trouillard docteur Butler, les improvisations de Sylvain qui n'avait que deux scènes à apprendre!! et les ajouts de dernière minute pas concertés
Butler (Youssef), qui fait une faute en écrivant la lettre:"t'as pas un effaceur?"
Rockefeller (Maxime):"Un quoi?"
Butler:"Un effaceur, un truc pour effacer..."
Rockfeller:"Ah! Un blanco, tiens!"
Comme ça ça peut paraitre anodin, mais précisons que la pièce se passe au XIXème siècle!!
Le soir de la générale (ah non pardon c'était la Première, y avait le public :P), j'en connais une qui n'a pas été loin de la crise cardiaque (non la crise de nerf, c'était fait depuis belle lurette avec nos répétitions ultra pas sérieuses ^^) et qui a pété un cable :P
Metteur en scène, qui prend son micro en pleine représentation, voyant que le blanc s'éternise (mélange de pinceau entre Sylvain qui répète trois fois la meme phrase et Maxime qui n'entend pas Rebecca - notre souffleuse bien aimée - lui hurler sa réplique alors que tout l'amphi l'a entendue lol): "Carlos doit sortir!"
Et là, regard consterné des acteurs qui scrutent le fond du public plongé dans le noir. Heureusement, Maxime se décide à sortir son Joker:
Téléphone portable caché dans la poche: "Oui allo, SOS (quelque chose du genre "texte oublié"), oui, j'ai oublié mon texte... Ok Merci"
Eclat de rire monstrueux dans la salle (Plus encore que quand Gilles hurlait Xxlllttt à tout bout de champ). Ouf, on est sauvé.
Sur les photos d'essayage il manque du monde, mais ils étaient pas là aussi!
Ambiance Petite Maison dans la Prairie totalement déjantée
Dommage que je n'ai pas pu récupérer les photos de cette pièce, ça aurait merveilleusement illustré mes propos (mais je ne désespère pas, en Septembre, j'assaille Anne-Marie avec ma clé USB!! pour peu qu'elle les ait aussi 0_o): un gospel ovationné (tain c'te honte on est monté trop haut avec Mary au premier refrain, c'était faux...), une récit tragique digne de Racine interprété par une Inham inspirée (lol), un Gilles époustouflant en indien survolté et obsédé (ouais, c'est vrai, il a pas trop eu à travailler son role ^^), une séance de divination à la boule de cristal (par votre serviteu...se déguisée en Caroline Ingalls, si si je vous jure, exactement la meme robe! en sus du meme prénom...), des cagouillages monstres du coté technique:
Carlos (Ben) contant fleurette à Paméla Rockfeller (Mary): "La lune se voile..."
Hop! le noir sur scène, trop tard, parce que notre ingé son et lumière avait du mal à suivre les didascalies dans le noir (faut avouer que c'était pas facile le pauvre...)
A l'entracte, noir sur scène (les rideaux de l'amphi ne marchaient pas on est pas aidé :-( ), gros branle-bas de combat pour retrouver l'une des trois malheureuses flèches tirées à l'acte précédent pour la donner à Inham qui est censée etre blessée:
"Psitt, quelqu'un l'a trouvée?
"On y voit rien!
"Elle devrait etre par là...
"Gallien (ingé son et lumière)! Gallien n'allume pas la lumière, on est pas prets!"
Je ne me souviens plus si le public a ri à ce moment là :P
Pour cette pièce une dédicace spéciale à ma petite Rebecca, souffleuse embusquée que personne n'entendait à part le public :P, sur qui j'adorais pousser la poussière de la scène (l'est jamais nettoyé cet amphi!!!) à grands coups de balai (fonction principale de Caroline Rockfeller quand elle ne fait pas à manger, qu'elle ne tricote pas ou qu'elle ne prophétise pas :P)
Anne-Marie Dissard à la mise en scène, la présentation, la gestions, l'administration... tout quoi^^
2ème année: succès posé, le vaudeville maitrisé
En fait quand je dis 2ème année, c'est erroné. Fort de son succès de décembre, le club a enchainé, après moults recrutements, sur une pièce en mai (2006), malgré le stage des 1A en Janvier.
Comme nous sommes beaucoup plus nombreux (le double), il faut trouver une pièce avec beaucoup de personnages.
Ce sera le Fil à la Patte de Georges Feydeau, gros succès de Noel pour les animateurs de France 2 (on est loin d'avoir leurs moyens et à défaut d'un grand succès télévisuel, on a eu un grand succès zizitévien. Pour le coup je pourrais dire un succès ISITVisuel mais j'ai dit que j'arretais les jeux de mots à deux balles...).
Finalement, y avait pas assez de personnages puisque je me suis retrouvée assistante de mise en scène. Ce qui veut dire que celle qui foutait limite le plus de bordel dans les répètes se retrouvait à dire aux acteurs de se calmer, c'est le monde qui tourne à l'envers lol! Mais en fin de compte, pour raison de désistement à la dernière minute (hem merci Inham de nous lacher sans prévenir), j'ai eu droit au role: de la vieille fille acariatre... Ca me va donc si bien que ça, d'etre l'emmerdeuse de service jamais contente? :P
Comme on change pas une équipe qui gagne (quitte à donner des frayeurs à Anne-Marie, toujours à la mise en scène) on est pret... le soir de la première aha (maintenant on a pris l'habitude de les appeler Générale en Public). En beaux costumes d'époque, les mecs en costards, les nanas en robes longues et en chignon (ouais bon le chignon... moi je suis pas fan lol mais c'était la mode de l'époque)
Un gros travail sur les choeurs (on a mis du temps avant d'etre au point lol)
De gauche à droite: debouts: JB (de Cheneviette), Adrien (Bois d'Enghien), Maryline (Ignace de Fontenay).
Assis: Aurélie (Lucette) et Gallien (Bouzin)
Une Aurélie cocace en Lucette amoureuse mais un poil vénal, un Maxime génialissime en général sud-américain exilé avec le petit accent qui va bien, et un Fabien hilarant en interprete stoique meme apres s'etre pris trois portes dans la figure.
Moment de gloire (pas sur cette photo) pour Marcelline, la petite soeur de Lucette (c'est moi, je me jette deux trois fleurs lol):
Irrigua (Maxime): "Et yo l'ai pensé aussi à la sor!" (oui le général ne maitrisé pas parfaitement le français, enfin selon ses propres dires:"là-bas (en Amérique du Sud), yo lé parle biene et ici, yo né comprends pas... yo lé parle mal!")
Marcelline: "Pour moi? Oh général, il ne fallait..."
Antonio (Fabien) sort un bouquet ridicule (non mais vraiment RIDICULE, trois fleurs en plastiques Lol) en comparaison de celui que vient de recevoir Lucette...
Marcelline:"... pas."
Irrigua: "Il est plousse petite mais il est plousse... portatif!"
Et là Marcelline elle a envie de crier "connard!" mais elle est bien élevée alors elle sourit et une petite courbette pour remercier avant de balancer le bouquet (de toute façon le général tout ce qui l'intéresse c'est Lucette, alors...). D'autant que deux minutes plus tard elle se fait rembarrée comme une malpropre par sa soeur... ^^
Maryline en Ignace de Fontenay (la femme qui pue lol) dans le pire passage de la pièce:
"Vous avez des cors? Oh c'est laid ça."
Gallien en Bouzin, notaire parolier à ses heures perdues, dans une bien (drole) mauvaise posture: encore un talent révélé par le club ;)
Les gendarmes arrivent (pas toujours au meilleur moment^^)
Maryline en concierge:"Y a un homme en caleçon dans les escaliers, faut aller le choper!!"
"Allez, avance ma grosse meringue!"
Merci JB de me faire encore une fois passer pour une truffe, comme si Marcelline n'avait pas suffi (Non Marcelline ne se marie pas, on aurait du mal à lui trouver quelqu'un à celle-là, c'est un second role de l'acte III)
3ème année: de la crise au succès Lyonnais
Année scolaire 2006-2007: avis de recrutement massif! Maxime est parti (faute de thèse sur Toulon...), Aurélie et Audrey se sont envolées pour Cranfield (Angleterre), Mary, Nelly et JB ont laissé tomber, Rebecca délaisse la scène pour cause d'emploi du temps de ministre. Heureusement que les premières années sont motivées (au début y en avait beaucoup, après on a quand meme réussi à en garder 5!).
Le problème (quoi? encore!), c'est la pièce, on trouve, difficilement, quelque chose qui conviendrait au nombre d'acteurs. Et puis, ça ne va pas, c'est pas franchement drole (disons que l'humour de Gogol sur la critique de moeurs bourgeoises de son époque est TRES subtile...), les textes sont lourds, les scènes statiques, personne ne la sent bien cette pièce. Alors on abandonne: à tout juste deux mois du Festival de Théatre organisé par le BDE de l'ENTPE (Lyon) et pour lequel notre dossier de candidature a été retenu (ce fut l'un des arguments les plus rabachés au cours des sessions de demande de subvention mode [fière de faire partie du club] ON: "et je tenais à préciser (en passant l'air de rien) que nous avons été sélectionnés pour participer au Festival INTERNATIONAL (ouais c'est pas juste trois pequenots du coin, c'est trois pequenots du monde lol) de Théatre de Lyon." mode [fière de faire partie du club] OFF, mode [me demandez surtout pas quelles répercussions ça aura sur l'école/université svp] enclenché...)
Donc, il faut se magner le train me direz-vous. Bah oui, d'autant que ça fout le moral de tout le monde à zéro (surtout celui d'Anne-Marie). Heureusement, le rayon librairie de Carrefour (et Fabien par la meme occasion), nous sauvera la mise. [...] Attendez! Vous etes pas sérieux, c'est pas le titre de la pièce? Sur le coup je n'ai pas pensé cela quand on a su que désormais on jouerait Le Voyage de Monsieur Perrichon, par Eugène Labiche.
Non sur le coup, c'est plutot la distribution des roles. Au vu des caractères des personnages (et de quelques photos disséminées dans les chapitres scolaires de l'édition), Anne-Marie trouvait que les personnalités collaient très bien à tel ou tel acteur: ainsi elle proposa à Gallien le role de M. Perrichon (qu'il refusa parce qu'il ne voulait pas d'un trop gros role et qui échut donc à Fabien) bourgeois bon vivant, imbu de lui-meme et ingrat (non, rien à voir avec Gallien je vous assure lol), Gilles, à qui collaient comme une seconde peau les roles d'un indien barjo et d'un majordome caustique, monta en grade avec le role du commandant qui n'arrive pas à se défaire de sa maitresse qui le ruine, Gaelle devint mademoiselle Henriette Perrichon, Adrien écopa du role du prétendant sournois et Benjamin du prétendant honnete et Gallien renfila le costume de fonctionnaire un peu bouc-émissaire pour notre plus grand plaisir... et Julie celui d'une Caroline (oui encore!) Perrichon, épouse de monsieur, parce que: "c'est vous qui faites la plus agée..."
Remise en question philosophique (ça tombe bien ce matin c'était l'épreuve de philo pour ceux qui passaient le bac...): devais-je en conclure que les gens me considérait comme une personne acariatre, raleuse (certes je le reconnais), méchante meme, en gros une vieille peau de vache? Allons, je ne me suis pas vexée pour ça lol! Et puis Caroline Perrichon n'a rien d'une peau de vache. Comme tous les personnages féminins de théatre de l'époque, elle se caractérise quand meme par une personnalité très peu développée.
Pour en revenir à l'histoire du titre, petite anecdote (tiens j'entends quelqu'un qui maugrée devant son ordi: "tain il commence à etre long son article, elle abrège, oui!"):
Demande de subvention au FSDIE (un organisme que j'ai pas bien compris ce qu'ils font dans l'université mais qui nous donne des sous alors le reste on s'en fout :-P)
Titre du projet en haut du dossier: Le voyage de Monsieur Perrichon (bah oui, vous vouliez que j'y mette quoi d'autre?)
Situation: 17h un vendredi soir, le FSDIE auditionne tous les clubs et assocs ayant demandé une subvention depuis 9h du mat'. Je suis l'avant-dernière à passer (je plains sincèrement le type qui était derrière moi quand je repense à l'état dans lequel les jury étaientquand j'ai quitté la salle...). Avant y a eu pas mal de gros projets: le 4L Trophy, des gens qui voulaient créer une assoc pour faciliter l'installation des étudiants marocains qui viennent passer un master en France...
La porte s'ouvre enfin et ça commence fort. Un type lit le nom du dossier et part en vrille:
"Le Voyage de M. Perrichon? Le voyage de M. Perrichon en 4L au Maroc..."
Eclats de rire. Je sens qu'on va pas s'entendre toi et moi... Les deux nanas du groupe s'excusent.
"Depuis neuf heures, on en peux plus."
Oh ben oui, pauvres choupinettes, z'etes sous pression, c'est vrai que c'est pas facile d'entendre des gens exposer pendant dix minutes un projet qui leur tient à coeur. Bref passons.
Je peux pas en caser une. Le type en face de moi, qui a fait la remarque, se bidonne et se cache derrière un magazine (Tain mais ils ont quel age???!!!)
Après avoir exposé les tenants et les aboutissants du club (on a été sélectionné pour le Festival International de Lyon!), j'arrive à la question cruciale: le club demande une subvention de 700€.
"Eh ben il s'emmerde pas Perrichon! Il part en avion?"
"Eh ben je lui ferai passer le message... Des questions?" Ma main dans la gueule pour vous calmer peut-etre? Bon c'est vrai que c'était pas forcément un choix judicieux de m'envoyer jouer les diplomates :) Je ne sais pas s'ils sont venus à la représentation (je les ai invités par courtoisie, enfin invité à acheter une place hinhin) mais Perrichon les aura bien fait marrer.
Bon et la pièce dans tout ça? Et bien elle aura un franc succès, que ce soit à Lyon ou à Toulon!
Fabien a immortalisé un Perrichon dégoulinant de fatuité
Les premières années ne sont pas en reste (et en plus ils ont fait un super boulot de régie derrière le rideau! chapeau) Henrick en facteur de gare et Carine en vendeuse de livres (elle avait de quoi s'occuper lol)
Ronan a eu un franc succès avec sa tenue de Tyrolien. Difficile pour Olivier (derrière), Adrien et Benjamin de ne pas rire.
Gilles: "Oui, j'aime Clichy (c'était une prison pour les endettés...), mais pas les jours où je dois me battre"
J'suis un beau gosse. Une touche de fantaisie moderne qui n'est pas sans rappeler les décalages scèniques du Vent dans les Branches de Sassafras.
Bon voilà, fin de la (longue) rétrospective.
Si vous passez à Toulon pendant une représentation, n'hésitez pas, c'est vraiment un pur moment de bonheur et la relève des 1A est bien motivée.